Islamo-gauchisme (suite)

Le problème n’est pas seulement celui de l’université. Avant de préciser, un autre extrait de dialogue, toujours dans les pages numériques du Monde.

Un commentaire :

« On s’en fout un peu qu’une terminologie n’ait pas de réalité scientifique sur un domaine qui n’a rien de scientifique. L’islamo-gauchisme a une réalité politique, c’est bien la seule chose qui compte. Tout mon soutien à la Ministre et à tous ceux qui veulent que les religions restent exclusivement de l’ordre de la sphère privée, sans aucune manifestation publique, notamment dans les universités. Le seul fait que les mots de la Ministre suscitent la polémique est un marqueur des plus inquiétants. »

Ma réponse 1 :

Que « les religions restent de l’ordre de la sphère privée sans aucune manifestation publique » implique-t-il qu’elles ne puissent entrer à l’université en tant qu’objet d’étude ? Par exemple : le fondamentalisme religieux – quelle que soit la religion – en tant qu’il intervient dans la sphère publique/politique (mariage pour tous, PMA, contraception, voile, nourriture etc.). L’objet du débat concerne non des manifestations religieuses dans l’université, mais le contenu de travaux sur le rapport entre une conception religieuse donnée (islamisme) et des situations socioéconomiques particulières. Pensez-vous qu’il faille exclure du champ du travail universitaire tout ce qui touche à la religion ?

Sa réponse :

« Je distingue bien volontiers les études sur la religion des études pour la religion ou influencées par la religion. Du reste, si l’objectif de ces études est de faire passer un message politique, c’est peut-être aussi que la problématique est moins scientifique que… politique. »

Ma réponse 2 :

Vous voulez parler de militantisme. Autrement dit, un travail d’étude entrepris dans l’université à des fins politiques, partisanes. La question qui se pose alors est celle des critères d’appréciation, donc des outils dont dispose ou est censé disposer le CNRS sollicité par la ministre pour déterminer la valeur universitaire d’un contenu. Ce qui présuppose un accord sur la réalité de l’objet « islamo-gauchisme », autrement dit une analyse critique du discours qui l’institue comme tel et qui lance l’accusation (celui de Marcel Gauchet, Pierre Nora, Gilles Kepel…*) avec les mêmes outils.  Il y a une autre approche possible du problème : et si on laissait libre la confrontation des deux discours à l’intérieur de l’université en rappelant ce qu’est la dialectique dans son rapport au vivant ?

Il n’y a pas eu de réponse…

* Complément

Extrait de leur tribune publiée dans Le Monde en novembre dernier « Les idéologies indigéniste, racialiste et « décoloniale » (transférées des campus nord-américains) » sont bien présentes à l’université, affirmaient-ils, « nourrissant une haine des « Blancs » et de la France ; et un militantisme parfois violent (qui) s’en prend à ceux qui osent encore braver la doxa antioccidentale et le prêchi-prêcha multiculturaliste. Houria Bouteldja a ainsi pu se féliciter que son parti décolonial, « rayonne dans toutes les universités ».

Cette tribune venait après les propos du ministre de l’Education Nationale stigmatisant, après l’assassinat de Samuel Paty, « des courants islamo-gauchistes très puissants dans les secteurs de l’enseignement supérieur. » 

Deux universitaires, Alain Policar, chercheur associé au Cevipof, et Alain Renaut, philosophe, ont réagi à la tribune de leurs collègues dans les pages « Idées » de Libération. Ils rappellent d’abord le communiqué de la Conférence des présidents d’université – « instance que l’on ne peut soupçonner d’un quelconque gauchisme » – selon lequel « la recherche n’est pas responsable des maux de la société, elle les analyse ».

Extraits :

 « Concernant l’indigénisme, sa principale incarnation, le Parti des indigènes de la République (PIR), a totalement échoué dans sa volonté d’être audible dans nos enceintes universitaires. Chacun sait bien que l’écho des thèses racistes, antisémites et homophobes de Houria Bouteldja est voisin de zéro (…) Restituer à l’égal sa différence, tel est le projet du multiculturalisme, destiné en définitive à aller plus loin dans l’instauration de l’égalité que n’était parvenue à le faire la solution républicaine classique. » (Site de France Culture à la date du 6.11.2020)

Précision :

Sans parler de celui du ministre, le discours de Marcel Gauchet, Pierre Nora, Gilles Kepel etc.,  me paraît « hors temps, statique ». En d’autres termes, il ne considère pas les aspects de démesure  qu’il souligne (et qui sont réels) comme un élément de dialectique, mais il les identifie au discours qui les contient qu’il présente donc comme un corps étranger (dans le sens biologique), ce qui revient à dire qu’il se présente lui-même, avec ses codes et son mode d’analyse, comme le signe du vrai  Bref, un discours académique qui jouit de ses propres critères.

La démesure qui peut lester le discours « indigène, anticolonial, racialiste », comme ils le qualifient, oppose parfois un radicalisme de même intensité à celui qui fut est qui est encore celui d’une idéologie qui justifiait et justifie toujours le colonialisme, qui ne remet pas en cause le mot « race », non en tant que signe historique, mais en tant que non-sens scientifique (id. pour « esclavage », d’où la spécificité du discours américain), bref qui refuse de considérer l’hiatus entre la devise républicaine et le réel, têtu dans l’esprit et tenace dans le corps.

2 commentaires sur « Islamo-gauchisme (suite) »

  1. L’islamo-gauchisme » universitaire n’existe que dans les fantasmes de l’extrême-droite et de ses relais médiatiques. On remarquera que Madame Vidal s’épanche dans CNews, la chaine caniveau du journalisme d’extrême droite de Zemmour and Co.
    Résurgences ..: Samedi 30 novembre 1940, Paris-Soir titre en première page « DÉBARRASSONS L’UNIVERSITÉ de l’emprise judéo-maçonnique ». Le Figaro vendredi 12 février 2021 « Comment l’islamo-gauchisme gangrène les universités ».

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