La grammaire française telle qu’elle est enseignée aux professeurs par le ministère de l’Education nationale (10)

*Rappel :

-GFM : Grammaire française « ministérielle » (sur Internet)

– GEQ : La grammaire en questions – titre d’un essai de l’auteur du blog.

Voici les exemples que GFM regroupe sous le titre « complément circonstanciel de concession »:

1- Le facteur distribue le courrier malgré la pluie.

2 – Le facteur distribue le courrier bien qu’il pleuve.

3 – Il a échoué à son examen tout en n’ayant commis aucune infraction grave.

4 – « Ah ! pour être dévot, je n’en suis pas moins homme. » (Molière)

Remarque critique : ce qui importe à GFM, c’est de caractériser la forme de chacune des expressions de ce qu’il qualifie de concession  mais il n’explique pas ce que signifie concession* ce qui crée une confusion avec opposition, et, au bout du compte, la même absence de rapport au sens.

[Il n’évoque l’opposition qu’au niveau II – p.65 et avec cette explication : La relation établie entre plusieurs propositions par juxtaposition est sémantiquement implicite. Il peut s’agir  (…) d’une idée d’opposition : « Les pauvres ont la santé, les riches ont les remèdes. » (proverbe). ]

Il précise donc : pour 1 : GN (groupement nominal) (malgré la pluie), pour 2 : proposition subordonnée (bien qu’il pleuve), pour 3 : gérondif (tout en n’ayant commis ),  pour 4 : GIP (groupe infinitif prépositionnel) (pour être dévot).

-1 et 2 : en quoi la pluie serait-elle une « concession » à la distribution du courrier ? L’idée n’est-elle pas plutôt celle d’une opposition entre un acte (distribution du courrier) et ce qu’on estime incompatible avec lui (la pluie) ? (Il faudrait consulter le cahier des conventions employeur-syndicats)

– 3 et 4 : même remarque : il s’agit dans les deux cas d’une opposition-contradiction, objective entre deux événements (pas de faute<=> échec) et idéologique entre deux états (dévot <=> homme).  

* Faire une concession (latin concedere : se retirer, accorder quelque chose à quelqu’un) signifie qu’on se « retire » d’une position, d’un point de vue, par exemple pour favoriser une relation. Ainsi, dans une discussion, concéder quelque chose peut aider à la poursuivre. Ex : « Je suis d’accord avec vous pour dire que l’aide à mourir peut poser un problème moral à certains bien que je ne partage pas votre choix de l’interdire. » Autrement dit, je reconnais un accord avec vous (= je me « retire » de ma position qui est contraire à la vôtre) pour signifier que cet aspect du problème ne l’enveloppe pas mais en constitue un élément.

GEQ (vous allez voir qu’il n’hésite pas à répéter ce que je viens d’expliquer ! Bon. Comme ce n’est pas tout à fait mot pour mot… je ne dis rien) : Faire opposition, c’est poser (latin ponere), un objet, une idée, en face de (ob, devenu op), c’est mettre un obstacle devant quelqu’un ou quelque chose ; faire une concession, c’est au contraire se retirer, abandonner (cedere, qui signifie aller, céder, est ici combiné avec cum, comme il peut l’être avec de – décéder : quitter, abandonner la vie – ou avec sesécession : provoquer une séparation). [vous avez remarqué que ce n’est pas du copié-collé]

Si les deux termes sont de sens opposé, ils peuvent se compléter : je peux m’opposer à quelqu’un qui défend un point de vue que je ne partage pas et en même temps lui faire une ou des concessions sur tel ou tel aspect secondaire de la question discutée (Bien qu’elles soient séduisantes, vos assertions sont contestables.). [même remarque]

Deux exemples d’opposition :

« Je grelotte bien qu’il fasse chaud. »

– « Je viendrai bien que vous me l’interdisiez. ».

Il s’agit ici de deux oppositions de valeur différente : la première est subjective (si je grelotte, c’est que je suis malade, il n’y a donc pas d’opposition objective avec la température ambiante et le médecin dira « parce que vous êtes malade ») alors que la seconde est une opposition objective (l’interdiction n’est pas une question de point de vue).

Analyser les deux propositions introduites par bien que comme des concessives n’a aucun sens.

Analyser les deux phrases en parlant de principales et de subordonnées d’opposition ne rend pas compte du fait que l’opposition n’est pas dans l’une ou l’autre des deux propositions mais dans leur rapport.

S’en tenir à l’analyse traditionnelle (celle de GFM, notamment, c’est moi qui l’ajoute à GEQ) peut conduire à un affaiblissement de sens : ainsi dans la phrase « Le moteur de ma voiture n’a pas démarré bien que j’aie tourné la clef de contact », la subordonnée sera dite d’opposition, et dans  « Le moteur de ma voiture n’a pas démarré quand j’ai tourné la clef de contact » elle sera dite de temps. Si on élimine la notion de subordonnée et l’obligation de donner une fonction, on mettra en évidence les rapports (de valeur différente) de temps et d’opposition dans la seconde phrase.

(à venir : le verbe)

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