La grammaire française telle qu’elle est enseignée aux professeurs par le ministère de l’Education nationale (6)

*Rappel :

-GFM : Grammaire française « ministérielle » (sur Internet)

– GEQ : La grammaire en questions – titre d’un essai de l’auteur du blog.

Coller une étiquette est un procédé qui consiste à indiquer qu’on a identifié un événement, un objet, un individu, un problème, un procédé etc. Ex : « c’est un accident, c’est une voiture, c’est un policier, ce sont les conducteurs, c’est le constat d’assurance…». Ce qui implique que la référence soit (considérée comme) objective, c’est-à-dire consensuelle, commune. Survient un problème quand la référence, présentée comme objective, ne l’est plus –  « injustice » dépend de la définition qu’on donne à « juste »  –  ou qu’elle est imposée par une idéologie comme une évidence indiscutable –  « terrorisme » (il y aussi « folie meurtrière ») impose  une psychologie, une idéologie, une intentionnalité « évidentes » et culpabilise l’analyse au prétexte que l’explication est une justification. De même, dire que quelqu’un est « doué » ou « n’est pas doué »,  suppose l’existence ou l’absence du « don » (ou de son ersatz physiologique « la bosse » … des maths), une idéologie utilisée pour la justification de la discrimination scolaire ou du statu quo.

Trois premières étiquettes : attribut, épithète, apposition indiquent trois fonctions, principalement de l’adjectif, ainsi enseignées à l’école.

Attribut > GFM (niveau I p .16) : « Dans le cas particulier où le sens du verbe se réduit à une idée d’identification (Alice est avocate) ou d’attribution d’une propriété (Alice est grande), le verbe est dit de type « attributif ». Le principal verbe attributif est le verbe être. La fonction de l’élément qui est associé au verbe attributif dans le GV est la fonction attribut du sujet. La fonction attribut du sujet peut être assurée par un GN ou par un adjectif ».

Critique de GEQ : la distinction « identification » « attribution » est intéressante à double titre : elle incite à s’interroger sur « être » (cf. article précédent) et pose la question de la pertinence de l’étiquette « attribut » puisqu’elle peut être appliquée à ce qui n’est pas une attribution.

Epithète > GFM (niveau II p.96) « La fonction épithète est, comme la fonction complément du nom, une fonction majeure au sein du groupe nominal (GN). Elle se distingue de la fonction complément du nom en ce qu’elle relie un constituant (adjectival ou nominal) au nom d’une manière non pas indirecte mais directe, c’est-à-dire sans préposition : « une avocate remarquable » (la fonction épithète est une relation directe entre l’adjectif remarquable et le nom avocate) se distingue à cet égard de « une avocate de talent » (la fonction complément du nom est une relation indirecte, passant par la préposition de, entre le nom avocate et le nom talent).

Critique de GEQ : on retrouve dans l’explication la distinction forme/sens. Une épithète ne se distingue du complément du nom que de manière formelle.  Du point de vue du sens, une épithète est un complément d’information du nom.

Apposition > GFM (niveau II p.97) « Un constituant de fonction apposition (ou apposé) n’est pas une expansion interne au groupe nominal (GN), mais un apport d’information externe au support que constitue le GN. En d’autres termes, l’apposition n’est pas une expansion du GN mais une expansion au GN : par exemple, dans la phrase « Cette avocate remarquable, exaspérée, quitta le tribunal », le participe exaspérée est apposé au GN cette avocate remarquable.»

La distinction « expansion du ou au groupe nominal » est encore d’ordre formel.

GEQ : Attribut et apposition (latin) dont des mots du langage courant utilisés ensuite par la grammaire alors qu’épithète (grec  epitithenaï = placer à côté ) suit le chemin inverse. L’explication ne peut donc pas être du même ordre puisque les deux premiers renvoient à des significations non grammaticales.

En fait, si dans le discours de GFM, attribut concerne le sens, épithète et apposition désignent des places, des situations de l’adjectif, dans la phrase.

Proposition : l’adjectif  (latin adjectus = ajouté à)  a une seule fonction : apporter une information à un nom. Quand l’adjectif est qualificatif (il précise une « qualité », une « manière d’être »), cette information a trois valeurs possibles:

Exemple : « Elégante, cette jeune avocate est remarquable »

– de détermination = le sens de la phrase repose sur lui (remarquable) ;

– de mise en relief, de soulignement (élégante) ;

– de simple renseignement (jeune).

Avec les variations qui conduisent à faire imaginer, pour chacune d’elles, celui ou celle qui parle :

« Jeune, cette remarquable avocate est élégante »

« Remarquable, cette élégante avocate est jeune »

Cette explication permet de lever en même temps la difficulté « attribut non attributif » et celle que peut créer la confusion de l’attribut du complément d’objet direct avec l’épithète.

Ex :« Je trouve cette avocate remarquable » : il sera difficile de faire comprendre que remarquable n’est pas épithète bien qu’il soit placé à côté du nom, mais qu’il est attribut de ce nom bien qu’il n’y ait pas le verbe être. La difficulté est levée si l’on s’intéresse au sens qui conduira au développement « Je trouve que cette avocate est remarquable ».

On pourra objecter à GEQ que ce type d’explication pose le problème de la dénomination de l’information. Si on n’utilise plus « attribut, épithète et apposition » comment nommer ce qu’ils désignent ?

Objection à laquelle GEQ répond qu’il ne propose pas de supprimer les trois dénominations, mais de les subordonner à l’explication de sens. A partir du moment où il est clair que l’adjectif en tant que tel (il peut être utilisé comme un nom) a une seule fonction (apporter une information à un nom), il ne voit aucun inconvénient à ce que la première valeur soit appelée attribut, la seconde épithète et la troisième apposition parce que les trois dénominations ne seront plus que des auxiliaires du sens.

Ce qui a pour conséquence non négligeable un changement dans le discours du maître procédant à un contrôle de grammaire qui demande traditionnellement : quelle est la fonction de remarquable (=> je trouve cette avocate remarquable). Il ne demandera plus la fonction de… mais l’explication du sens de la phrase. Autrement dit, les dénominations ne sont acceptables que lorsqu’on n’a plus besoin du repérage pour comprendre le message. Ce qui pose la question de leur durée de survie.

 (à suivre)

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