Ce qui est frappant dans la communication du premier ministre, Jean Castex, c’est son absence d’empathie. Il annonce les décisions de manière mécanique, froide. Son visage est inexpressif. Il ne joue pas à « faire croire à », à « donner l’impression de ». C’est en quoi il diffère principalement d’E. Macron qui a fait du théâtre à l’école, comme on sait.
Et pourtant, ce que vivent les hommes et les femmes, tous confrontés à des degrés divers aux problèmes que créent, en plus de ceux des crises socioéconomiques ordinaires, l’épidémie et son lot d’interdits, est de l’ordre à proprement parler du tragique : c’est la vie qui est en jeu.
Le décalage entre le ton des énoncés de gestion politique et la réalité vécue me semble être l’expression d’un discours nécessairement implicite et dont ce premier ministre, choisi par le président, est le signe : les plus forts s’en sortiront, les autres disparaîtront, c’est la « loi naturelle ».
D’un côté, les mesures d’interdiction qui, pour autant qu’elles limitent la contagion, ne résolvent rien, de l’autre la vaccination dont les incertitudes d’efficacité et les aléas de production peuvent contribuer à renforcer l’idée qu’au fond, la prise en compte du commun est secondaire parce qu’il n’y a pas de prise sur l’événement. Du moins pour le moment.
Œdipe Roi, tragédie écrite par Sophocle il y a près de 2500 ans, raconte le malheur d’une cité (Thèbes) frappée par un mal qui met en cause la vie dans sa globalité. Œdipe, dont l’accession au pouvoir constitue le cœur du récit, en trouve la cause en procédant d’une manière qui s’apparente à la psychanalyse : par la parole, le questionnement, il retourne dans sa propre histoire pour tenter de comprendre, puis, quand il a compris, se crève les yeux pour éradiquer le mal commun et trouver la paix pour lui-même.
L’essentiel humain, dit, entre autres, la métaphore, est intérieur.
Rien, dans l’attitude du premier ministre n’évoque une intériorité.