Jean-Baptiste Rambla est, pour la seconde fois, jugé pour meurtre d’une jeune femme. Il ne la connaissait pas. Il est entré chez elle et l’a égorgée. La première fois, c’était en 2008 pour l’assassinat, également d’une femme commis quatre ans plus tôt. Il avait été condamné à 18 ans de prison.
Il est le frère de Maria-Dolorès enlevée et tuée en 1974.
Il avait six ans.
Il a vu le ravisseur qui lui a parlé et il a vu sa voiture.
Devant les policiers, il n’a reconnu ni Christian Ranucci qui était suspecté, ni sa voiture.
C. Ranucci a été condamné à mort et exécuté en1976.
Ce que l’enfant a dit par cette négation (= cet homme n’est pas celui qui a enlevé et tué ma sœur) a été nié.
En d’autres termes, en condamnant et en exécutant C. Ranucci, on a dit à l’enfant : si on t’avait écouté, le meurtrier de ta sœur serait resté impuni.
La haine du père – dont la violence a trouvé un écho et un refuge au FN – et celle du fils contre ceux qui, après l’exécution, ont tenté de montrer que C. Ranucci n’était peut-être pas le coupable (Gilles Perrault et Le pull-over rouge, notamment), pourrait s’expliquer par cette double négation.
Et si le père n’avait pas été absolument certain que celui qui a été guillotiné était vraiment le coupable ?
Et le fils, qui sait, lui, que fait-il de ce double non, le sien et celui qui le nie ?
Et si l’un et l’autre n’avaient pas pu supporter que d’autres le signifient à leur place ?
Est-ce que l’objet de leur haine n’a pas été (le père est mort) et n’est pas confondu avec « eux-mêmes » ?
Mais comment vivre avec la haine de soi ?
Ou plutôt, comment ne pas vivre ?