Le Monde daté du 7 mai que j’ai trouvé dans ma boîte ce matin 11 mai, (loin de sonner deux fois, le facteur ne passe plus tous les jours depuis le 16 mars), publie sur deux pages les « 100 principes pour un nouveau monde » de M. Nicolas Hulot.
Chaque principe commence par « le temps est venu » qui n’est pas sans rappeler « les temps sont proches » de la venue du Messie, avec tout de même la différence que le Messie serait là. Noël !!, donc, comme on s’exclamait dans les temps très anciens.
Laissons de côté l’inadéquation de « principes » pour ce qui n’est en réalité qu’assertions qui ont l’immense mérite de n’être jamais affaiblies par la moindre précision, encore moins par la moindre explication, et encore moins par la moindre analyse.
On objectera que ce n’est pas l’objet de « principes », et que ce même numéro du Monde offre encore une interview de deux pages au même M. Hulot photographié dans une pose à la fois à la fois inspirée et inspirante. Il livre donc quelques pensées nouvelles à la mesure de sa posture, comme celles-ci :
– « Il est temps de s’attaquer aux racines du mal »
– « Il faudra voir si l’on est capable de définir l’absolu prioritaire et de le constitutionnaliser. »
– « Il y a un modèle que l’on ne peut pas poursuivre jusqu’à l’absurde »
– « Si demain, le temps des procureurs l’emporte sur le temps des éclaireurs, on ira dans le mur »
– « Il ne faudra rien s’interdire en termes de propositions. Réformer la fiscalité et avoir une TVA incitative, en Europe, sur les biens et les services écologiquement et socialement vertueux, et qui soit dissuasive sur des biens toxiques, permettant de structurer les modes de production et de consommation».
A aucun moment, M. Hulot ne précise quels sont le modèle, le mal, ses racines auxquels il faut « s’attaquer » (donc rien sur la nature des armes permettant cette attaque essentielle) et pour définir l’essence du nouveau monde il a cette formule limpide « Il doit être radical en humanité et en solidarité ». J’ai vainement cherché dans la suite ce que pouvait bien vouloir dire « radical en humanité ». Mes livres, non plus, ne m’ont donné la moindre réponse. Je ne pas trouvé non plus ce qu’est un « temps qui l’emporte sur », ni ce qu’est un « bien toxique ». Quant aux propositions qui ne souffriront donc aucune interdiction… elles sont déterminées par une fiscalité qui doit permettre de « structurer des modes : autrement dit, un mode étant une manière de faire, il s’agit d’ajustements qui ne touchent en rien ce qu’il appelle les « racines du mal » qui désignent une essence. Exemple « « Trouvera-t-on, des produits alimentaires hors saison dans les magasin. Non. Rapidement, il faudra que l’offre et la consommation changent ». Comment changeront-ils ? Suffira-t-il d’interdire par décret l’importation des cerises pour Noël ? Des ananas ? Des bananes ? Dans quel type de rapport s’inscrit ce type d’importation ? Est-il à sens unique ?
Rien dans l’interview ne concerne le système qui régit le rapport production/consommation, le capitalisme – le mot n’est pas cité –, et ce que propose M. Hulot n’est rien d’autre que ce que d’autres avant lui ont appelé la « moralisation » du système. Lui parle de vertu.
Quant aux 100 principes… En voici quelques-uns parmi les plus brillants.
2 – Le temps est venu de transcender la peur en espoir
3- Le temps est venu pour une nouvelle façon de penser
8- Le temps est venu de ne plus laisser l’avenir décider à notre place
9 – Le temps est venu de ne plus se mentir
10 – Le temps est venu de réanimer notre humanité
13 – Le temps est venu de traiter les racines des crises
15 – Le temps est venu d’entendre la jeunesse et d’apprendre des anciens… (…)
Ces formules de catéchisme auraient justifié par leur nombre le pluriel du « vacance » donné au titre de l’article, mais il a déjà été pris. J’ai gardé le singulier qui a l’avantage de mettre en évidence le vide.
Ces quatre belles pages consacrées à M. Hulot dans ce journal pourraient inciter des esprits malveillants à poser la question du pourquoi autant de place à ce monsieur ? N’y aurait-il pas là, comment dire, une intention visant l’élection présidentielle de 2022 ? Pour celle de 1981, F. Mitterrand avait fait 110 propositions… mais il est vrai que ce n’était pas des « principes »… même s’ils n’en sont pas.
Le journaliste qui ne pouvait évidemment pas s’interroger sur ces quatre pages si rarement attribuées à une même personne, lui a posé la question…
« Je suis à des années-lumière de cette échéance » a-t-il répondu.
Le Monde en est peut-être un peu moins loin…