Richard Wagner – Der Ring des Nibelungen ( L’anneau du Nibelung – La Tétralogie) (7 et fin)

La mise en scène de Patrice Chéreau, choisi en 1976 pour le centenaire de la première représentation du Ring et dont Pierre Boulez assura la direction musicale, fut accueillie par des huées et suscita un scandale lors de la première. Quatre ans plus tard, la représentation ultime fut applaudie pendant une heure et demie avec plus de cent rappels. Il existe, à côté des enregistrements (réalisés en studio), un enregistrement vidéo de cette réalisation – les prestations vocales ne sont pas toujours très séduisantes, et l’ensemble – orchestre et chant – est, pour moi, nettement moins intéressant que la version enregistrée par G. Solti.

P. Chéreau transpose l’histoire racontée dans le Ring des lieux mythologiques où elle est censée se dérouler dans l’Europe capitaliste du 19ème siècle, donc à l’époque où vécut Wagner. D’où le scandale initial pour un public qui ne venait pas à Bayreuth pour voir construire sur la scène de l’opéra la problématique du monde réel. Wagner avait pourtant choisi cette petite ville pour se distancier des lieux traditionnels de l’opéra.

C’est pourtant bien son monde réel que représente Wagner dans le Ring. L’utilisation de la métaphore d’une mythologie s’explique à la fois par la recherche de l’absolu que l’art cherche à atteindre au-delà des contingences et à exprimer en tenant compte des codes qui lui sont attachés, notamment ceux du « jeu » que j’ai tenté d’expliciter dans l’article précédent.

Il s’agit de pouvoir, de richesse et de leur rapport d’incompatibilité avec l’amour.

L’histoire commence et se termine dans l’eau (élément premier) où évoluent les trois filles du Rhin chargées de conserver l’or en tant que symbole, hors des représentations de pouvoir, de richesse et des luttes pour les acquérir.

Alberich, le maître des Nibelungen qui demeurent dans l’obscurité des profondeurs de la terre – essaie vainement de séduire les filles qui se moquent de lui. Il parvient à voler l’or et au prix du renoncement à l’amour forge l’anneau (ring) qui assure le pouvoir suprême.

L’or (richesse) et l’anneau (pouvoir) sont au centre des conflits qui vont opposer les Nibelungen Alberich et son frère Mime, au dieu Wotan, aux deux géants Fafner et Fasolt, à Sigmund et Sieglinde (enfants de Wotan), à Siegfried leur fils et Brünnhilde (la Walkyrie, fille de Wotan), enfin aux Gibischungen Hagen, Gutrun et Gunther.

L’amour, incarné à la fois par le couple divin infertile Wotan/Fricka et par des couples incestueux (Wotan/Erda, Siegmund/Sieglinde, Siegfried/Brünnhilde), est impossible dans cette configuration de la lutte pour la possession de l’or/pouvoir, qui détruit jusqu’à l’innocence pure (Siegfried).

Le dieu Wotan, dont le comportement est déterminé (avec l’aide de Loge) par le calcul et la ruse, apparaît comme la figure lasse, désabusée, d’un monde finissant et qui aspire à sa propre fin. Le palais (burg) qu’il s’est fait construire au prix d’un marchandage sordide s’écroule à la fin dans les flammes tandis que les filles du Rhin récupèrent dans l’eau qui engloutit Hagen (meurtrier de Siegfried, allégorie du calcul, de la ruse, de la cupidité), l’or qui retrouve la valeur symbolique qu’il avait avant le vol d’Alberich.

Le monde ancien mort, l’histoire de l’homme peut commencer.

Difficile de ne pas apercevoir la silhouette synchronique de Marx fixant le début de l’Histoire humaine, après le renversement du capitalisme et la dictature provisoire du prolétariat, dans l’avènement du communisme.

La différence essentielle entre les deux se trouve dans la dimension révolutionnaire du discours tel qu’il est créé, politique pour Marx, musical pour Wagner.

Techniquement, la composition wagnérienne suit les règles de la musique tonale – elle s’appuie principalement sur la tonique et la dominante de la gamme considérée (do et sol pour la gamme de do) – mais elle utilise des procédés qui dérangent l’ordre convenu, par exemple les appogiatures (introduction d’une note qui ne « « convient » pas, provoque une insatisfaction et appelle donc une résolution), comme déjà celle de Bach, et plus tard celle de Mahler. Je ne reviens pas sur la rupture des codes de l’opéra traditionnel.

La musique de Wagner est une musique d’insatisfaction permanente, inaboutie, sans fin, composée d’une succession d’éléments parfaitement aboutis. Parmi les innombrables exemples – si vous disposez de Spotify  : dans le Crépuscule des Dieux ( G. Solti)   – l’entrée 143,  à la 9èmeminute et 20 secondes – la voix de Christa Ludwig soutenue par les cors d’harmonie.

De ce point de vue, elle est radicalement différente de celle de Mozart – avec une nuance pour Don Giovanni – dont j’ai dit qu’elle est à mon sens l’expression la plus aboutie de la joie (article précédent), la joie de l’enfant tenant la main de l’adulte. Elle est, non au contraire, mais complémentairement, l’expression de la tragédie humaine transcendée par le geste de l’adulte tenant la main de l’enfant.

Je conseille à cet adulte de lire le  poème-récit puis de refermer le livre pour laisser l’enfant écouter.  

Richard Wagner – Der Ring des Nibelungen ( L’anneau du Nibelung – La Tétralogie) (6)

Un moment avec Mozart, ou, ceci n’est pas une digression.

Comme le théâtre, mais à un degré autre,  l’opéra est une représentation du « jeu » (à la fois divertissement et articulation) de la structure permanente constituée des deux strates interférentes, épique et philosophique, qui nous constituent. Une représentation traditionnellement codifiée par deux décorums en harmonie, d’une part celui de la scène aux décors peints où évoluent les chanteurs/acteurs costumés au-dessus de la fosse d’orchestre, d’autre part celui de la salle ornée et des spectateurs, elle et eux en habits de luxe et tenant un discours spécifique

Dans la deuxième « époque » de Les Enfants du Paradis – film de Marcel Carné et Jacques Prévert réalisé pendant la guerre  – l’acteur Frédérick Lemaître et le misanthrope/assassin Pierre-François Lacenaire révèlent, en les pervertissant, le discours des codes : le premier quand il interpelle le public pendant son interprétation de L’auberge des Adrets, le second, à l’issue de la représentation d’Othello, quand, en tirant le rideau de la fenêtre qui sépare le foyer du théâtre – le jeu y continue –  du monde extérieur, il révèle au comte de Montray,  la relation entre sa maîtresse, Garance et le mime Baptiste.  

Ces codes disent que les deux discours  (scène/salle) disent le réel (l’amour, la mort principalement), mais dans le jeu de l’artifice des deux décorums auxquels il est demandé de faire comme si ce n’était qu’un jeu ; c’est ainsi que dans l’opéra,  la parole devient chant et  musique – dans une certaine mesure, c’est aussi vrai pour le théâtre – avec escamotage d’orchestre et applaudissement des performances vocales – Mozart ajouta des arias à Don Giovanni pour tenter d’amadouer le public viennois.

Le théâtre et l’opéra sont – à la différence de la salle de cinéma – les lieux construits pour le jeu gratuit de l’adulte-enfant et le jeu intéressé du pouvoir (idéologique et politique) avec ce jeu, non exclusifs d’un de l’autre, la place du curseur déterminant par exemple l’importance du composant « sincérité » de l’un, et celle du composant « snobisme » de l’autre.  

Les opéras de Mozart n’eurent que des succès mitigés à la cour de Vienne, en particulier Don Giovanni dont la création, plus populaire, à Prague connut un triomphe, et qui fut pour Wagner la référence majeure – la prestation des deux géants Fafner et Fasolt rappelle parfois la scène finale avec le Commandeur.

Si Mozart respecte les codes, dont ceux du compartimentage – récitatifs, arias, chœurs – sa musique les transcende et se situe dans un espace autre, ailleurs que dans les seuls jeux évoqués.

Telle est la problématique illustrée dans le film de Milos Forman, Amadeus, par l’incompréhension à certains égards émouvante du personnage d’Antonio Salieri, très satisfait de sa propre musique jusqu’au moment où il entend celle de Mozart. Peu importe le degré d’authenticité historique en regard du réel qu’explore la problématique du film, à savoir l’énigme que représente la musique mozartienne que le personnage de Salieri ne parvient pas à résoudre autrement que par une révolte adolescente stérile.

Au début du film, Salieri, qui a tenté de se suicider et qui s’accuse d’avoir tué Mozart, est visité dans sa chambre d’hôpital par un prêtre qui essaie vainement d’obtenir une confession. Ce prêtre, dont les connaissances musicales sont sommaires, ignore que le vieil homme qu’il a devant lui a été un compositeur célèbre en son temps, et Salieri s’obstine alors à se faire reconnaître en lui jouant sur le clavier de son instrument des extraits de ses compositions. Il faut voir, après les mines désolées du malheureux prêtre confus qui ne connaît rien de ce qui est joué avec autant d’attente, l’illumination du visage de l’acteur lorsque, par dépit, Salieri finit par jouer les premières notes de la Petite musique de nuit, une mélodie que le prêtre reconnaît aussitôt puis chante avec un enthousiasme d’autant moins dissimulé qu’il la croit composée par celui qui la joue et qui lui révèle qu’elle est de Mozart. Discours rude et cruel de Peter Shaffer (auteur de la pièce adaptée par Milos Forman et dont il fut le scénariste du film), diront peut-être certains, mais qui, aujourd’hui, joue la musique de Salieri ?

Ces quelques notes apparemment banales, qui « sur le papier n’ont l’air de rien » comme le dit Salieri à propos du troisième mouvement de la Sérénade 10 « Gran Partita » (sur YouTube, l’ensemble à vent de l’Orchestre Symphonique de Londres) qu’il entend dans les salons du comte-archevêque Colloredo, sont un exemple de l’énigme dont les opéras offrent des exemples tous plus remarquables les uns que les autres – parmi les perles, une mention pour les duos de Cosi fan tutte.

On est à la fin du 18ème siècle (Mozart meurt en 1791), dans un moment de transition entre deux mondes. S’il peut l’être par les mots (cf. le Viva la liberta ! dans la scène des masques) Don Giovanni, comme l’ensemble de l’œuvre mozartienne, est explicite du besoin d’ouvrir en grand les fenêtres, non pour laisser entrer l’air de la révolution sociale, mais celui de la liberté essentielle de l’homme et dont le moment historique facilite l’ouverture quand elle n’en brise pas les vitres.

Cette approche que d’autres tentent par les mots de la littérature, Mozart la hisse à un niveau remarquable de connaissance intuitive (affects et pensée) par une invention mélodique et une recherche harmonique de l’orchestration qui bouleverse les références pour atteindre un absolu que confirme sa constante modernité.

Deux exemples, anecdotiques si l’on veut : dans les Noces de Figaro, l’aria (non piu andrai) que chante Figaro à Chérubin après que le comte en fait un soldat pour s’en débarrasser, et dans Cosi fan tutte le chœur « Bella vita militar » de l’acte 1, avec lesquels Mozart renverse, en donnant l’impression de s’amuser, la musique militaire de son piédestal – j’y reviendrai avec l’utilisation des cuivres par Wagner.

Le jeu d’opéra, entre monde épique et monde tragique, est alors encore déterminé par des références classiques que les bouleversements économiques et politiques vont démolir.

Le ailleurs de Mozart est là : la musique qu’il donne à entendre est celle d’une transcendance d’où ont été évacués Dieu en tant que réponse existentielle – d’où l’explication par défaut « divin Mozart » – (Don Giovanni) et l’aristocrate en tant qu’incarnation du pouvoir  (Les noces de Figaro), à l’intérieur de l’immanence des problèmes à dimension purement humaine (Cosi fan tutte) et jusque dans le domaine de la spiritualité ésotérique de la Flûte enchantée.

Je ne sais pas définir ce qu’il réussit à produire (pour le corps et l’esprit) autrement que par la joie dans le sens que donne Spinoza à cette unité intuitive essentielle de l’homme et de la Nature et qu’exprime – un siècle et demi après Monteverdi et quelques décennies après Bach, l’un et l’autre dans des modes différents – la conjonction de l’indicible individualité de Mozart et le monde alors en révolution.

Soixante ans plus tard, dans le commencement de « l’autre monde », les strates, épique et tragique, jouent dans un contexte radicalement différent.

(à suivre)

Agnès Buzyn et l’aide active à mourir… + ajout

Agnès Buzyn fut ministre de la santé entre 2017 et 2020.

Le Monde (17/03/2023 – p.12) reproduit son interview sous le titre : « L’aide à mourir est un débat entre bien-portants ». L’ex-ministre de la santé Agnès Buzyn alerte sur les risques de dérives de l’euthanasie ou du suicide assisté. »

Extraits : « Si je m’exprime aujourd’hui, c’est à travers ma pratique professionnelle. (…) J’ai malheureusement vu des centaines de personnes en fin de vie. Je n’ai pas le souvenir de malades qui m’aient demandé à mourir. (…) J’ai progressivement acquis la conviction que cette question de la liberté de la mort se pose essentiellement quand on n’est pas en face de la mort. Elle survient quand on est encore en bonne santé (…) Le débat sur l’aide active à mourir est, à mes yeux, d’abord un débat entre personnes bien portantes. [La loi Claeys-Leonetti] est insuffisamment appliquée faute de soignants assez nombreux en capacité de la mettre en œuvre [Elle évoque les maladies les plus dégradantes] Il y a une ouverture à avoir pour que ceux qui souffrent de ces maladies puissent ne pas être condamnés à être progressivement totalement handicapés, enfermés dans leur corps. Les obliger à endurer cette torture sur un temps long peut être insupportable. Comment autorise-t-on ces personnes qui ne veulent pas vivre ce cauchemar à dire « Là, j’arrête, je n’en peux plus ! » La liberté envers et contre tout comporte le risque de faire peser sur des personnes vulnérables le poids de l’aide active à mourir.(…) Je pense que les professionnels de santé seraient davantage prêts à accepter une aide active au suicide. C’est moins pénible pour un médecin que de devoir déclencher lui-même la perfusion létale. On ne devrait pas faire peser sur les soignants le choix ultime. [Question : Est-ce le moment d’évoluer ? ] La période est délicate. Si on ajoute une mission de ce type aux médecins alors qu’ils ont déjà l’impression, faute de moyens et de temps, de ne plus pouvoir soigner et accompagner leurs patients comme avant, le message est angoissant. Cela ne veut pas dire qu’il faut rien faire. Il faut avancer. Tout est une question de nuance et de curseur. »

J’ai envoyé au Monde la réponse ci-dessous à ce qui me paraît un discours teinté de mauvaise foi (cf. L’invocation de « La liberté envers et contre tout ») et contourné, sans parler de l’aplomb à utiliser l’argument du « manque de moyens » des médecins par celle qui, en tant que ministre de la santé, a appliqué une politique de restrictions dénoncée par l’ensemble des personnels soignants.

Ma réponse :  

Le premier argument de l’ancienne ministre de la santé est celui de son expérience de médecin (« Je n’ai pas le souvenir de malades qui m’aient demandé à mourir ») que renchérit l’affirmation « Le débat sur l’aide active à mourir est, à mes yeux, un débat entre personnes bien portantes. » On trouvera sans difficulté d’autres expériences qui souligneront la valeur toute relative de la sienne et d’autres philosophes qui lui rappelleront que la justesse de la pensée est plus assurée quand l’esprit n’est pas perturbé par le problème qu’il doit traiter, ce qui explique par exemple qu’un principe de droit n’est pas débattu à chaud par ceux qu’il concerne mais à froid par des juristes.

La formulation de son indignation « Comment autorise-t-on des personnes qui ne veulent pas vivre ce cauchemar [lié aux maladies dégénératives qu’elle cite] à dire « Là, j’arrête, je n’en peux plus !  »  a ceci d’étrange qu’elle confond « supporter » et « autoriser » comme si la réponse à apporter à ces personnes devait être une interdiction de « dire ». Un lapsus qui témoigne d’autre chose que d’une méconnaissance du langage.

Quant aux « effets collatéraux » qu’elle invoque et aux problèmes de conscience que peut poser au médecin l’aide active à mourir, ils sont l’argument habituel utilisé pour esquiver les deux questions premières et essentielles qui en déterminent la perception, à savoir la reconnaissance du droit pour le sujet de disposer de sa vie et la problématique du choix qui implique nécessairement un renoncement.

Madame Buzyn n’aborde ni l’une ni l’autre, sans doute parce que les aborder revient à constater qu’il ne s’agit ni d’imposer ni d’interdire, comme le fait la loi actuelle,  mais d’élargir le champ de la responsabilité et de la liberté.

Enfin, l’affirmation que les difficultés rencontrées par les médecins pour accompagner les malades seraient une « impression » surprend d’autant plus que madame Buzyn a été ministre de la santé et que la politique qu’elle a appliquée n’est peut-être pas étrangère au manque de « moyens et de temps » qu’elle invoque pour justifier l’inopportunité de mener à son terme le débat, aujourd’hui.

Ajout : La lettre des Idées du Monde (17.03.2023) publie la tribune en tous points remarquable d’un homme atteint de la maladie de Parkinson, qui apporte un démenti à l’affirmation de madame Buzyn « Le débat sur l’aide active à mourir est, à mes yeux, un débat entre personnes bien portantes« .

 Richard Wagner – Der Ring des Nibelungen ( L’anneau du Nibelung – La Tétralogie) (5)

A la fin de la « Causerie enregistrée à la librairie Olivieri »  (> YouTube : Jean-Jacques Nattiez – Les récits cachés de Richard Wagner), quand il souligne la contradiction énigmatique entre le génie musical de Wagner et son antisémitisme, le musicologue utilise – sans violence –  le qualificatif de « salaud ». En quoi cette appréciation morale –  une façon de dire qu’il condamne l’antisémitisme – serait-elle un élément d’explication ? Je la comprends plutôt comme le signe d’une limite de l’analyse, ce qu’est le plus souvent le collage d’étiquettes.

Si Wagner est antisémite, son œuvre n’est pas le discours de l’antisémitisme – ce que sera celui du nazisme – mais un discours qui contient des expressions de l’antisémitisme.  Autrement dit, son œuvre n’est pas celle d’un militant antisémite, pas plus que celle de Voltaire qui reprit en son temps à son compte les clichés judéophobes et antisémites sans apparemment se poser la question de la contradiction avec la philosophie universaliste qu’il promouvait.

La preuve d’évidence en est fournie par le fait qu’elle est interprétée dans les sociétés démocratiques qui condamnent l’antisémitisme, dirigée par des chefs – dont certains sont compositeurs – d’origine juive (G. Malher, D. Barenboïm,  L. Bernstein…) et écoutée par ceux que révulsent le racisme dont il est une des formes.

Avant de revenir au Ring, un détour par Tristan und Isolde, une œuvre dont J-J Nattiez dit qu’elle est dépourvue de toute expression d’antisémitisme. L’essentiel du récit : Tristan est chargé par le roi Marke de ramener d’Irlande Isolde qu’il doit épouser. Ils ont naguère été frappés par le même coup de foudre amoureux après que Tristan eut tué Morolt, le fiancé d’Isolde. Sur le bateau qui les conduit en Cornouailles, ils boivent le philtre d’amour que Brangäne,  la servante d’Isolde, a substitué à leur insu au poison préparé par Isolde pour Tristan et pour elle-même. Le philtre (= la levée de l’interdit) autorise donc un amour impossible.

Un des passages les plus remarquables est, dans l’acte II,  la scène de la déclaration d’amour, dans laquelle Isolde (soprano) et Tristan (ténor) tiennent chacun de son côté, et dans quelques moments de duos, une ligne non mélodique (la maîtrise de la voix est déterminante – Birgit Nillson  et Wolfgang Windgassen, dans la version de Karl Böhm au Festival de Bayreuth de 1966) et où l’orchestration est à la fois un support harmonique et un discours complémentaire. L’absence de mélodie lie la ligne de chant et l’orchestration qui n’existent qu’ensemble (ici, métaphore de l’amour-fusion des deux personnages – j’y reviendrai) dans près de trois quarts d’heure d’une densité musicale qui rend sans objet l’argument de l’antisémitisme pour justifier un rejet de l’œuvre de Wagner.

Tout a déjà été dit sur les racines de l’antisémitisme et le besoin de créer des boucs-émissaires.

Il s’agit d’identifier les facteurs qui peuvent expliquer son activation, autrement dit d’examiner le contexte dans lequel il devient un recours pour des individus et une société.

Appliquée à la musique, la problématique peut se formuler ainsi : que signifient l’abandon de la mélodie, du compartimentage (récitatifs, arias, chœurs) de l’opéra traditionnel et le choix de la fusion des deux éléments autonomes que sont devenues la ligne du chant et l’harmonie de l’orchestration.

(à suivre)

Richard Wagner – Der Ring des Nibelungen ( L’anneau du Nibelung – La Tétralogie) (4)

J’ai écouté (sur Internet où j’ai également trouvé quelques articles) deux interviews de Jean-Jacques Nattiez, musicologue québécois, spécialiste reconnu de l’œuvre de Wagner et qui s’est intéressé précisément à l’expression de l’antisémitisme dans sa musique dont il précise l’importance qu’elle a pour lui.

Il prend les deux exemples évoqués dans l’article précédent : Beckmesser (Les Maîtres chanteurs de Nuremberg),  Alberich et Mime (Ring).

Le premier des deux opéras a pour cadre la confrérie des Maîtres chanteurs de la ville de Nuremberg, en l’occurrence le concours de chant qu’ils organisent et dont le vainqueur, qui doit être un maître, épousera Eva, la fille de Veit Pogner, un des maîtres. Elle vient de rencontrer Walther et les deux jeunes gens ont été frappés par le même coup de foudre. Mais Walther, un profane, ne maîtrise par l’art du chant alors que Bekmesser qui convoite Eva est un maître de la confrérie. Walther tente d’être admis mais Beckmesser, chargé de relever les fautes, l’élimine en l’humiliant. Hans Sachs, poète, cordonnier et maître qui fait autorité (un personnage historique), aide Walther à mettre en musique l’ode qu’il a écrite pour Eva et l’invite à la chanter au concours. A la suite de quiproquos, Bekmesser tentera de chanter l’ode, se ridiculisera,  Walther  gagnera le concours et épousera Eva.

Jean-Jacques Nattiez explique que cette ode, très mal chantée par Beckmesser contient des caricatures de chants rituels juifs, et il précise que les auditeurs juifs de la première représentation de l’opéra l’avaient signalé.

Alberich et son frère Mime sont deux Nibelung, des êtres habitants dans les profondeurs sombres de la terre et leur attirance pour l’or en tant que moyen de pouvoir et de domination permet de les considérer comme des figures de l’antisémitisme déclaré de Wagner, tout particulièrement Mime interprété par un ténor dans la partie la plus haute, peu agréable, de la tessiture.

Le problème est le suivant : est-ce que la musique – hors parodie déclarée – peut tenir un discours idéologique, en l’occurrence antisémite ? Et est-ce qu’elle peut jouer pour l’auditeur le rôle du message subliminal ? Autrement dit, est-ce que l’écoute de la musique de Wagner pourrait me rendre antisémite ? Ou encore : si je dis que le langage des mots d’Heidegger contient nécessairement ce qui constitue le nazisme dont il fut un partisan encarté et depuis le début, est-ce que je peux le dire aussi pour le langage des notes de la musique ? Nécessairement, dans le sens où ce qu’il écrit, et quel qu’en soit l’objet, dit qui il est, étant entendu que le nazisme – en tant que théorie de l’humanité, de l’homme et des rapports humains –  choisi par conviction – ce qui fut le cas pour Heidegger – n’est pas pour son adepte un à-côté du soi mais révèle son être. C’est également vrai pour les choix qui engagent dans le champ de ce que j’appellerai la réponse totale (christianisme, communisme, par exemple).

Est-ce que la judéophobie  (hostilité à la culture juive) et l’antisémitisme (stigmatisations de caractéristiques physiques) de Wagner peuvent être comprises comme un engagement de ce type ?

J-J Nattiez explique qu’il a commencé à écouter la musique de Wagner dès son adolescence. Il n’est pas devenu antisémite. La lecture d’Heidegger – sans parler de sa fréquentation (cf. Anna Arendt) – ne produit pas non plus mécaniquement cet effet. Ces constats ne résolvent pas le problème, ils soulignent seulement la spécificité de l’œuvre d’art, qu’elle s’exprime par les mots (en l’occurrence ceux de la philosophie – cf. les articles « La cause première » à partir du 21.10.2022) ou par les notes.

Wagner a nommé David, un des personnages sympathiques des Maîtres chanteurs et, à la différence de Mime, Alberich est interprété par un baryton-basse.

(à suivre)

Richard Wagner – Der Ring des Nibelungen ( L’anneau du Nibelung – La Tétralogie) (3)

La question sociale était une des préoccupations de Wagner – de tendance plutôt anarchiste, il participa à la tentative révolutionnaire de Dresde en 1849 – comme elle fut à la même époque celle de Marx et de tous ceux que ne laissaient pas en repos les problèmes que posait le début de l’essor industriel et commercial du capitalisme. L’antisémitisme très répandu jusque dans la pensée socialiste d’alors est aussi une composante de l’idéologie de Wagner (comme elle le fut de celle du  « jeune Marx » cf. La question juive) et il plonge une partie de ses racines dans l’histoire familiale… comme ce fut le cas pour Marx (cf. Article 12 « Etat des lieux – essai sur ce que nous sommes – 25.09.2020).

La rencontre entre la réalité sociale et la réalité familiale ne se fait pas toujours sur le mode de la contradiction.

Le père de Wagner mourut alors que Richard avait 6 mois et sa mère se remaria avec un homme d’ascendance juive, Ludwig Geyer – acteur de théâtre et peintre –, qui mourut alors qu’il avait 9 ans et dont il ne découvrit qu’à l’adolescence qu’il n’était pas son père biologique – c’est à ce moment-là qu’il prit le nom de son père, Wagner. Certains expliquent ainsi son antisémitisme, déclaré (cf. Le judaïsme dans la musique, un essai dans lequel il explique le danger que constituent les compositeurs juifs pour la culture nationale) ou caché dans les opéras (selon certaines interprétations, Alberich et Mime, les deux frères Nibelungen habitant les sombres profondeurs du Ring, Beckmesser –  Les Maîtres chanteurs de Nuremberg – seraient des figures de la judéité) dont il faut noter qu’aucun livret ne délivre de message antisémite explicite. Wagner ayant eu toute sa vie un problème majeur avec l’argent dont il ne parvint jamais à avoir la maîtrise, on peut encore émettre l’hypothèse que ce rapport difficile pourrait être une seconde « raison ».

Comme Hitler admirait la musique de Wagner, il est tentant de dire qu’elle contient les éléments qu’a utilisés le chef nazi… à moins qu’il ne s’agisse – comme pour Nietzsche – d’une exploitation, ce que pourrait bien confirmer le fait que la multitude de ceux qui aiment l’écouter ne sont pas antisémites. Daniel Barenboïm, par exemple. Moi aussi… ou non plus.

L’écoute des premiers opéras montre l’importance de l’influence de Mozart, Beethoven et, surtout, Weber : les échos de son Der Freischütz (mon  interprétation de référence : Carlos Kleiber – Staatskapelle de Dresde – Gundula Janovitz – Edith Mathis – Peter Schreier – Theo Adam) qui y sont fréquents sont absents du Ring.

Les opéras de Mozart et Weber proposent, intercalés dans des récitatifs, des éléments musicaux (arias, chœurs) qui existent par eux-mêmes et qu’il est possible d’interpréter en dehors de l’œuvre. Tout mélomane peut fredonner l’aria d’Agathe, le chœur des chasseurs (Der Freischütz), l’aria de Chérubin (Les Noces de Figaro), celui du catalogue de Leporello (Don Giovanni), de Papageno (La Flûte enchantée) etc.

S’il en va de même pour le chœur des pèlerins (Tannhäuser)et celui des noces (Lohengrin), rien de tel dans le Ring.

Les seuls repères sont les leitmotive, à savoir un ensemble de notes insuffisant pour constituer une mélodie, encore moins une aria.

Exemple : l’entrée de Freicka et Wotan dans L’or du Rhin : le leitmotiv est constitué par un arpège descendant (4 notes), remontant (les mêmes 4 notes) répété 2 fois, à nouveau la remontée répétée 2 fois, puis, pour les mêmes notes,  des changements de modes et de tons du mineur au majeur jusqu’à l’intervention de Fricka qui invite Wotan à se réveiller.  Reprise alors du motif initial par les cuivres sous le chant linéaire  de Wotan (baryton-basse) qui n’est pas une aria et qui  retrouve le motif jusqu’au sommet, éclatant, de l’arpège.

De quoi s’agit-il ?

Je dirais, un affrontement entre la masse de l’orchestre – en particulier les cuivres – et l’individu – peu de duos, chœurs quasi absents (sauf dans la troisième journée : Crépuscule des Dieux) – l’un et l’autre « jouant » leur propre partition. Est donc rompue l’unité que constituaient dans les opéras, surtout de Mozart, dans une moindre mesure de Weber, la musique du chant et celle de l’orchestre d’une part, leur accord d’autre part. Sauf dans les leitmotive qui apparaissent ainsi comme des moments exceptionnels, d’autant plus qu’il n’est pas possible de les extraire comme on peut le faire pour les arias.

L’absence de discontinuité soulignée par la durée, la brièveté et le retour des leitmotive (de puissantes esquisses mélodiques) constituent les piliers de la problématique de l’œuvre.

(à suivre)  

Manifestations, syndicalisme et politique

La CGT – connotation historique révolutionnaire/communiste – a cessé d’être majoritaire dans le secteur privé trente ans après que s’est éteinte la lumière de l’alternative socialiste/communiste au capitalisme.

La CFDT – issue du syndicalisme chrétien et partisane de la réforme –passée devant la CGT, est sans doute aujourd’hui la plus désemparée des deux. Elle est en effet confrontée à une contradiction entre sa philosophie de la négociation et du compromis, et le mouvement d’une contestation devenue composante d’un radicalisme qu’elle a rendu possible en faisant des 64 ans une ligne rouge. Une fuite en avant plus ou moins imposée par le dédain, sinon le mépris du président de la République pour tout ce qui est intermédiaire.

 A la différence des partis politiques qui se différencient par des choix de société explicités, les syndicats ne définissent pas de projet global et expriment ainsi de manière indirecte, cryptée,  le « politique » à la fois exclu de leur discours en tant que tel et très présent en filigrane.

La CGT est, jusqu’à présent, restée majoritaire dans la fonction publique.

Cette particularité de la représentation syndicale est significative du rejet implicite global de la problématique du commun – explicite dans la sphère du politique – telle qu’elle a été construite jusqu’à la fin des années 80 et qui a encore un écho chez ceux qui sont en dehors du système de production.

Le président de la République sait le bénéfice qu’il peut tirer de l’absence de solution de rechange au système. Il sait que les millions de personnes descendues dans la rue pour protester contre le projet de réforme sont plus une juxtaposition d’individus qu’un peuple politique en mouvement. Les manifestants le savent aussi, même si la connaissance de cette réalité n’est pas du même genre.

L’inconnue réside dans les connexions possibles des petites machines individuelles de désespérance.

L’unanimité des députés chinois

« Cette réélection formelle, à l’unanimité des quelque 3 000 députés votants, marque l’aboutissement d’une ascension qui a vu Xi Jinping devenir le dirigeant le plus puissant du pays depuis des générations. » (A la Une du Monde – 10.03.2023)

Ma contribution :

Quelle différence entre cette unanimité et celle d’une religion autre fondée sur une foi autre? L’une et les autres ont en commun la réponse avant le questionnement et, variables dans l’histoire, les moyens de faire taire ceux qui voudraient penser au-delà des limites de la sphère du croire (en un dieu ou une idéologie). Même question pour l’individu sans « jeu » dans sa pensée,  qui s’efforce systématiquement de tout faire entrer dans sa grille de lecture. S’il donne à voir ici une image massive et mécanique, pathétique sous l’angle du rapport individu/collectivité, le totalitarisme (ce qui apporte la totalité des réponses), quelle qu’en soit la référence transcendante, est une des expressions de l’angoisse humaine qui tente par tous les moyens, psychiques et physiques, de contourner la spécificité de la réalité « simplement » immanente de l’homme… Pourquoi et pour quoi avons-nous besoin de voir des hommes marcher au pas – de l’oie ou pas ?

Un détenu libéré de Gantanamo

« Ghassan Abdullah Al-Sharbi, 48 ans, était enfermé depuis 2002 dans la prison de la base militaire américaine à Cuba, sans jamais avoir été inculpé. » (A la Une du Monde – 09/L03/2023)

Ma contribution :

– Ma loi est la loi parce que je suis le plus fort.

– Et les autres ?

– Quoi, les autres ?

– Ceux qui disent et qui font pareil, ailleurs ?

– Eux, c’est les forces du Mal. Enfin, pas tous, ceux de l’est. Surtout.

– Parce que vous, c’est les forces du Bien ?

– Et aussi du mâle, comme avant, dans l’ouest.

– C’est pas un peu vieux tout ça, non ?

– La preuve que non, c’est que ça tire toujours chez nous un peu partout. Et puis on a Dieu avec nous : « God bless America ! » Et j’ai juré sur la Bible.

– Poutine, lui aussi dit qu’il a Dieu avec lui Et il dit aussi que l’Ukraine est un danger de destruction massive pour la Russie.

– N’importe quoi !  Il est capable de tout, même de fabriquer des preuves !  

– Vous, non ?

Il lui donne une petit tape sur la joue.

– La force du Bien a toujours raison, fiston.

Richard Wagner – Der Ring des Nibelungen ( L’anneau du Nibelung – La Tétralogie) (2)

L’opéra, celui de Wagner notamment, est un des éléments de la problématique du rapport plus ou moins énigmatique entre ce qu’on appelle « art » et le ou les publics. En l’occurrence, l’art lyrique. Si la chanson est un art et si elle est « populaire », pourquoi l’opéra ne l’est-il pas ? Autrement dit et au risque de la simplification, si l’amateur d’opéras écoute les chansons, pourquoi l’amateur de chansons n’est-il pas aussi amateur d’opéras ? Simplification, oui, parce que les chansons n’ont pas toutes le même degré de popularité et peut-être aussi parce qu’il existe des opérettes – ah, le suffixe -ette ! Encore que… Ecoutez « La la la mine de rien, la voilà qui revient, la chansonnette… » interprétée par Yves Montand –  que n’apprécient pas forcément les amateurs d’opéras. Du moins en France.  Et puis, généraliser, comme ça…  Enfin, il y a quand même une part de réel dans ces distinctions.

Cette problématique n’était pas étrangère à Wagner qui avait été attiré par l’anarchisme – il participa à la tentative révolutionnaire de Dresde en 1849 – et choisit la petite ville de Bayreuth pour s’éloigner des lieux fréquentés par la bourgeoisie dans le but de permettre un accès populaire à ses opéras.  Sans doute un problème insuffisamment analysé, encore que l’esprit du festival de Bayreuth soit très différent de celui de Salzbourg, comme le signifie le prix des places.

Il y a en effet une spécificité de l’opéra wagnérien, que la question de l’épopée (cf. article 1) permettra peut-être d’identifier. Elle sera abordée un peu plus tard, je ne peux pas être plus précis.

Chanson ou opéra, il s’agit d’un récit, d’une histoire. L’ « ouverture » de l’opéra ou de la chanson fait entrer dans un monde autre – rien n’est plus frustrant, en tout cas pour moi, qu’une ouverture d’opéra jouée, seule, en élément de programme d’un concert.  

La différence la plus apparente est celle du temps. Trois minutes pour une chanson – on a à peine le temps de s’asseoir – des heures pour un opéra, plus de quinze pour les quatre opéras de la Tétralogie (le prologue : L’or du Rhin, puis les trois journées : la Walkyrie, Siegfried, Le crépuscule des dieux) donnés à la suite à Bayreuth.

Là, on s’installe.

Une supposition : vous ignorez l’allemand, vous êtes à Bayreuth pour assister à la représentation de la Tétralogie, vous connaissez l’histoire dans ses grandes lignes, mais vous n’avez pas la traduction du livret.

Est-ce que ça fonctionne ?

Je pousse un peu plus loin :  et si vous ne connaissez rien de l’histoire ?

Allons-y.

Vous ignorez tout de l’histoire, vous vous êtes débarrassé des idées reçues sur la musique de Wagner (du genre « Quand j’écoute trop Wagner j’ai envie d’envahir la Pologne » Woody Allen  –   c’est bien tourné, mais, et malgré la nuance du « trop »,  c’est quand même idiot) le début de L’or du Rhin.

Au tout début, tendez l’oreille, moins qu’une note et presque un bruit, une vibration, profonde et grave, soufflée, et qui se constitue peu à peu en musique d’ arpèges, crescendo, enrichie de cordes,  jusqu’à l’éclatement d’une voix féminine bientôt rejointe par deux autres.

Plus de quatre minutes. La chanson habituelle a fini de raconter son histoire. Et là, ça commence juste.

Justement, c’est le commencement. On vient du fond de… peut-être la nuit qui précède le jour, peut-être la nuit qui enfante le monde, allez savoir… et on émerge à la lumière de la femme. De quoi nourrir un discours, non ?

Quatre minutes 14 secondes dans l’enregistrement de Georg Solti, le premier du Ring en studio, fin des années 50. Un monument.  Si vous ne l’avez pas, si vous n’êtes pas abonné à un diffuseur (Deezer, Spotify…), vous pouvez trouver ces quatre minutes 14’ sur le site de France Musique : vous tapez « l’ enregistrement légendaire du Ring de Wagner par John Culshaw – c’est le producteur – et Geog Solti – le chef ).

Installez-vous et écoutez. Si vous avez un casque, c’est encore mieux. Et vous comprendrez pourquoi je parle de frustration. D’autant que suivent des extraits dont le choix pourrait être meilleur.

(à suivre)