L’affaire Xavier Gorce

Jusqu’au 19 janvier, Xavier Gorce était un dessinateur du journal Le Monde dont les dessins paraissaient dans la page informatique Le Brief du Monde destinée aux abonnés. Dont je suis.

Les personnages sont des manchots, le cadre une banquise, le titre « Les Indégivrables ».

Le dernier paru, donc le 19 janvier, présente deux manchot, un adulte et un enfant. L’enfant s’adresse à l’adulte et lui demande :  

« Si j’ai été abusée par le beau-frère adoptif de la compagne de mon père transgenre devenu ma mère, est-ce un inceste ? »

Le Monde a publié le dessin, puis annoncé très vite qu’il l’avait été par erreur et l’a retiré. Xavier Gorce a aussitôt décidé de quitter le journal.

« Nous considérons, en effet, que la liberté de la presse, élément vital de notre démocratie, ne peut se diviser. Elle doit être tout aussi complète pour les dessinateurs, ou les journalistes, que pour les journaux dans leur choix de publier ou non un dessin. En l’espèce, celui de Xavier Gorce pouvait être lu comme une relativisation de la gravité des faits d’inceste, à un moment où la société prend conscience de leur ampleur. Contraire à nos engagements éditoriaux, cette interprétation a choqué nombre de nos lecteurs. » (Extrait de l’article/justification de Jérôme Fénoglio, directeur du journal – 20 janvier)

Les réactions publiées des lecteurs sont dans leur grande majorité très critiques à l’écart du journal et plusieurs annoncent leur désabonnement.

Ma contribution :

« L’objet apparent, mais seulement apparent, du discours du dessin est l’inceste, une relation sexuelle familiale qui n’est pas un crime quand elle concerne des adultes consentants. Apparent, parce qu’il sert à dénoncer – s’il dénonce bien,  là est la question –  le contour désormais flou du « genre ». Le crime incestueux n’est en effet pas dépendant du sexe du violeur. La focalisation sur le caractère totalement irréel de l’auteur de ce qui semble bien un crime (vu l’âge du manchot) vide la scène de sa dimension dramatique… dans un moment où la société est confrontée à l’importance de ce problème. Pour moi, X. Gorce utilise le fait-divers dramatique et actuel pour parler d’un autre problème. On peut lire le dessin comme  » les repères fondateurs ont disparu, tout fout le camp » (dénonciation) ou comme le rapprochement de deux non-sens relativement aux critères habituels (thème de l’absurde).

L’humour est une  expression délicate parce qu’il suppose, pour être compris, la distanciation.

Quoi qu’il en soit, la censure est insupportable. »

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