« Semblant s’inspirer du processus de « civilisation des mœurs » décrit par le sociologue allemand Norbert Elias (1897-1990), le président de la République utilise un terme en entretenant un flou qui ouvre la porte à de multiples interprétations. (…) Le spectre des phénomènes qu’Emmanuel Macron cherche à décrire par ce terme est large et installe une forme de confusion d’autant plus grande que la France d’aujourd’hui se trouve réduite à un néologisme. Malléable, mais pas inédit, le terme « décivilisation » se prête pour cette raison à toutes les récupérations. » (A la Une du Monde – 02.06.2023)
Ma contribution :
Un débat dont le sens est à chercher dans son existence même. « Décivilisation » est un néologisme qui ne recouvre aucun réel relatif à la civilisation et qui dénote les peurs qui ont contribué à son invention. La civilisation étant un mode d’existence qui contient tout ce qui constitue la vie sociale, le mot ne peut objectivement renvoyer qu’à la fin de ce mode, autant dire à la fin de l’humanité, ce qui n’est pas ce dont parlent ses utilisateurs. La seule idée pertinente à discuter est celle du changement des critères de civilisation. Pour le meilleur ou le pire, c’est une autre question qui touche notamment au rapport sujet/objet que permet de contourner ce débat idéologique. La prétendue « décivilisation » servit d’argument essentiel aux nazis et à ceux qui collaborèrent avec eux pour créer l’abîme que la « décivilisation » était censée avoir creusé et tenter d’y jeter l’humanité.