Le suicide politique

Sauf à considérer que le président de la République est idiot, la constitution de ce troisième « nouveau » gouvernement oblige à chercher la signification d’un acte dont l’analyse est souvent réduite au mot  « provocation » ou « incompréhension ». En particulier le retour (à un autre poste) de l’ancien ministre des Finances, considéré comme le responsable du chaos budgétaire par ceux – le RN notamment – qui ont intérêt à personnaliser les causes pour faire monter l’exaspération populaire.

« On prend les mêmes et on recommence », disait, en le déplorant avec l’intonation du « je ne comprends pas », ce matin sur France Culture (8 h 15) le chroniqueur Jean Leymarie qui évoquait les solutions techniques possibles après une probable nouvelle censure.

L’attention est attirée par les médias et les partis sur ce qui se joue sur l’avant-scène, alors que l’essentiel se met en place dans les coulisses. L’art du prestidigitateur se manifeste autant dans l’agilité des doigts que par la capacité à diriger les regards.

Dans les coulisses, ce sont les affaires qui dessinent le scénario, en particulier dans les rencontres, discrètes, entre les grands capitalistes et les responsables du RN dont les sondages disent qu’il arrivera nettement en tête à la présidentielle de 2027 et aux éventuelles prochaines législatives.

Ce qui se prépare, en effet, c’est une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale, mais, cette fois, dans les conditions qui permettront de manière certaine au RN de gagner,  comme on l’avait cru il y a un peu plus d’un an.

La gauche avait gagné. Pas la gauche dite « de gouvernement » à majorité Parti socialiste façon Hollande, mais une gauche tirée par un discours à consonance populisme-révolutionnaire tel, surtout dans son élocution et par les passions suscitées, qu’il rendit possible le refus du président de désigner une personne de ce camp électoralement vainqueur pour former un gouvernement.

Il fallait ensuite créer une situation qui suscite une insatisfaction et une colère croissantes dont le bénéficiaire ne pourrait être que le RN – majoritaire en tant que force électorale autonome – , auréolé de surcroît par une condamnation pour détournements de fonds publics par « des juges politiques », comme peut encore l’être l’ancien président condamné, lui, pour association de malfaiteurs.

En opposition aux deux extrémismes populistes (de gauche minoritaire, d’extrême-droite majoritaire et invasif), deux gouvernements dit du « centre » chargés de cristalliser les passions en ne proposant rien que la répétition du même discours inaudible. Le troisième, maintenant, avant une nouvelle dissolution pour le succès du RN.

Tel est le scénario le plus probable, dicté par les intérêts que représente le président de la République, convaincus maintenant qu’ils ont tout à gagner avec un gouvernement dirigé par l’extrême-droite et persuadés qu’ils pourront le manipuler.  

L’inconnue est la résistance commune, électorale, faible, très faible, parce que le discours du commun a disparu.

Reste la résistance de chacun. Mais c’est une question tout autre.

Laisser un commentaire