La proposition de taxe concerne les patrimoines supérieurs à 100 millions d’euros. Je ne parviens pas à réaliser ce que ça représente. Une faiblesse d’imagination. Déjà, un million… Alors 100… Le smic, 1426,30 euros, permet le rapport avec le prix de la baguette, du kilo de pommes de terre. Mais 100 millions… J’entends bien qu’il ne s’agit pas de billets rangés dans une valise (une grosse valise) comme on voit au cinéma dans les transactions plus que douteuses. Quand même, sortir de chez soi pour faire les courses au marché en se disant, j’ai 100 millions. C’est idiot. Quand on a 100 millions on a quelqu’un qui fait les courses pour soi. Et puis, 100 millions, c’est le minimum. Il y en a qui ont des milliards. Là, pour moi, c’est du genre « ça se peut pas ». Toujours à cause de la même faiblesse. Mais non, ou plutôt mais oui, « ça se peut ».
Si j’ai bien lu, ces millionnaires ou milliardaires auraient toujours leurs millions ou milliards. Ils paieraient seulement les impôts qu’ils ne paient pas à cause de l’optimisation fiscale, dans le sens « optimisation pour ne pas payer d’impôts ».
Le Figaro qui n’est pas un journal de gauche dit que la taxe – elle apporterait entre 15 et 25 milliards par an dans le budget de l’Etat – est une supercherie socialiste.
Ce que j’ai cru comprendre, c’est que ce serait très dangereux pour l’économie du pays, d’abord parce que les très riches concernés placeraient leur argent à l’étranger, ensuite parce que le ruissellement en prendrait un coup. Le principe du ruissellement, c’est : plus les riches sont riches plus les pauvres sont moins pauvres. Ils restent pauvres, mais un peu moins. Ce n’est pas ce qui se produit réellement, mais le principe reste bon.
J’ai écouté Gabriel Zucman sur France Culture. Il développa son point de vue qui semblait d’autant plus convaincant que la goutte d’eau que représente pour les ultra-riches le prélèvement proposé compterait beaucoup pour la réduction de la dette publique. Un politiste avait été invité en même temps que lui. C’était avant le blocage du 10. Il dit que le système fiscal était sans doute une des causes de la colère. Et quand le journaliste lui demanda pourquoi la taxe ne recueillait pas un assentiment politique, il expliqua, très sérieusement, que l’opinion publique était hostile à toute idée de nouveau prélèvement fiscal.
Ni G. Zucman, ni le politiste, ni le journaliste ne se demandèrent pourquoi et pour quoi existait un tel système fiscal.
Le changer, inverser le sens d’optimisation fiscale, proposer que tout le monde, sans exception, paie l’impôt, ne serait-ce qu’un euro, suppose que soit construit le discours du commun.
Mais commun n’a pas été prononcé.