Journal – 59 – Iran : dilemme ? – (23/06/2025)

D’un côté, une dictature théocratique impliquée dans un processus nucléaire militaire, de l’autre, des attaques aériennes décidées unilatéralement par Israël et les USA pour arrêter le processus.

Comment construire une analyse ?

Rappel : le dilemme, ce sont deux propositions contradictoires également insatisfaisantes. L’exemple le plus connu est celui auquel est confronté Rodrigue (Le Cid, pièce de Corneille – 1637) : soit il obéit à son père (Don Diègue) et se bat à sa place (Don Diègue est trop vieux pour un duel) contre le père (Don Gormas) de sa fiancée (Chimène) qui l’a humilié, et, dans ce cas il la perd (parce qu’il aura été tué ou qu’elle ne voudra pas épouser le meurtrier de son père), soit il n’obéit pas et il la perd quand même parce qu’elle ne voudra pas épouser celui qui a dérogé au code/principe de l’honneur qui régit les rapports dans le monde aristocratique dont ils font partie.

L’événement iranien confronte au même dilemme (apparent) ceux qui sont à la fois hostiles au régime iranien et à la démarche unilatérale de bombardement, parce qu’un « je m’en lave les mains » ou un « renvoi dos à dos » est contradictoire avec le questionnement. A partir du moment où se pose la question, il faut répondre.

Pour Rodrigue, Corneille fournit la réponse : le changement de principe. Rodrigue l’envisage mais il y renonce :  il est un peu trop tôt pour la révolution. Il se battra.

Pour nous aussi, la réponse se trouve dans la problématique du principe, c’est-à-dire ce qui n’est pas de l’ordre de la valeur subjective mais de l’universel.  Par exemple ce qui détermine la définition de la démocratie, c’est le principe de la séparation des pouvoirs, législatif, judiciaire et exécutif. Ainsi, l’Iran n’est pas une démocratie, et c’est une affaire qui concerne exclusivement les Iraniens. Les USA et Israël ? Oui et non, en ce sens que les dérives de l’exécutif font actuellement vaciller le principe, comme le disent des voix étatsuniennes et israéliennes.

C’est ce que dit aussi l’attaque contre l’Iran. Il n’y a pas eu de déclaration de guerre, pas d’ultimatum (sinon une ruse tactique de D. Trump), mais une attaque combinée, sans préavis, comme l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Face à la menace nucléaire iranienne contradictoire avec le traité de non-prolifération des armes nucléaires – les spécialistes disent que le degré d’enrichissement d’uranium indique qu’il ne s’agit pas de nucléaire seulement civil – la réponse était à chercher dans le cadre des Nations Unies dont la Charte est reconnue comme un principe, et jusqu’au mandat international d’intervention militaire.

Les USA et Israël viennent de violer ce principe.

Quand, après les bombardements, D. Trump demande à l’Iran d’arrêter la guerre, il se comporte comme V. Poutine qui accuse l’Ukraine de ne pas vouloir la paix.

Tout se passe à l’envers du Cid, comme si c’était le père de Rodrigue qui lui demandait de ne pas respecter le principe, autrement dit d’en faire une valeur.

C’est ce à quoi nous assistons : les Nations-Unies, en tant qu’émetteur de principes (La Charte), ne sont plus audibles parce que leur a été substitué le discours de la valeur, celle du « Moi d’abord ! » dont les électeurs Maga (Make America Greta Again) commencent à réaliser qu’il concerne d’abord et avant tout le « Moi D. Trump ! » (cf. son enrichissement depuis son élection) et le monde des affaires dont il est un représentant.

Autrement dit, l’attaque USA-Israël contre l’Iran n’est pas acceptable en ce sens qu’elle contribue à nier le recours au principe du commun que représente l’ONU et qu’elle ouvre le champ de tous les possibles du « Moi d’abord ! » dont nous vérifions tous les jours qu’il est vecteur de catastrophes.

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