Je sais pas vous, mais moi, il y a des mots comme confit, brioche, cerise… qui remplissent la bouche comme les objets qu’ils désignent.
La Série Documentaire (17 h 00 sur France Culture) proposait ces derniers jours quatre épisodes intitulés « Manger la France ». Interviennent des professionnels de la restauration – au sens large – et, le plus émotionnel, les élèves de CM1 de l’école élémentaire « L’arbre sec » située près du quartier des Halles dans le 1er arrondissement de Paris. Il faut les écouter répondre aux questions que leur pose leur institutrice (on dit professeur des écoles, mais je préfère instituteur / institutrice à cause du sens premier latin « établir, fonder… » – on devrait enseigner le latin) : la spontanéité, les voix d’enfants sont une belle entrée en matière pour cette nouvelle année.
Furent mentionnés Le ventre de Paris, le troisième roman de la série des Rougon-Macquart écrite par Emile Zola (les Halles constituent le personnage central du récit), Bel Ami, écrit par Maupassant et dont fut lu un extrait (je le cite en fin d’article).
La nourriture, le repas, manger d’une manière générale sont indissociables des mots, du discours. Et ceux qui sont prononcés dans cette série d’émissions donnent une image apaisée et apaisante de l’homme. Associés aux voix des élèves du CM1 ils nous rappellent à la fois l’importance de la culture et, peut-être surtout, de l’enfant que nous avons toujours en nous.
Voici l’extrait de Bel-Ami – le personnage principal, Georges Duroy, est au restaurant en compagnie notamment de deux femmes amoureuses de lui et qui deviendront ses maîtresses : « Les huîtres d’Ostende furent apportées, mignonnes et grasses, semblables à de petites oreilles enfermées en des coquilles, et fondant entre le palais et la langue ainsi que des bonbons salés.
Pus, après le potage, on servit une truite rose comme de la chair de jeune fille (…) Et, comme la première entrée n’arrivait pas, ils buvaient de temps en temps une gorgée de champagne en grignotant des croûtes arrachées sur le dos des petits pains ronds. Et la pensée de l’amour, lente et envahissante, entrait en eux, enivrait peu à peu leur âme, comme le vin clair, tombé goutte à goutte en leur gorge, échauffait leur sang et troublait leur esprit. »
