Nous avons un ami dont le père nous recevait en ouvrant une première bouteille de champagne, puis une seconde qu’il justifiait en expliquant « On marche sur deux jambes ». Il y aurait peut-être eu des choses à dire sur le glissement sémantique de la biologie à l’œnologie (les termes ne sont pas vraiment adéquats, « sémantique » fait même nettement péteux, mais reconnaissez que ça sonne bien et puis… hein !) mais nous aimions tous le champagne, nous l’aimions beaucoup, certains plus que d’autres, certes, il s’agissait d’un Roederer – pour ceux qui connaissent, je n’en dis pas plus, pour ceux qui ne connaissent pas, non plus, quoique… oui, d’accord mais quand même, une fois dans sa vie – et personne n’avait envie de lancer un débat qui aurait conduit à remettre en question l’équilibre invoqué. Comme nous ne repartions pas immédiatement, il y avait d’autant moins d’incidences sur nos démarches physiques respectives que le champagne n’a que des effets bénéfiques, tout le monde sait ça.
C’était l’entrée en matière.
A midi, sur France Culture (à propos de la grève d’hier et avant-hier – voir Journal 52 – qui fut largement suivie, le bulletin d’information de 7 h 00 sur cette chaine – est-ce que j’ai déjà dit que je me levais tôt ? – n’en a pas dit un mot – bizarre non ?), l’émission Sous les radars de Nora Amadi. Le thème d’aujourd’hui : le changement climatique. Elle avait invité Sylvain Grisot, urbaniste, enseignant chercheur.
J’ai trouvé son discours juste et pertinent : il ne s’agit pas d’une crise ( une crise a un début et une fin) parce qu’il n’y a pas de sortie à envisager. C’est, dit-il, pire que ça.
Une crise existentielle, un modèle qu’il faut qu’on réinvente, demande-t-elle ?
Il dit qu’il est d’accord, que nous sommes « dans un moment d’accélération de la transformation des pratiques. » Il précise : accélération des chantiers de l’adaptation.
Les lecteurs du blog savent que c’est le constat que je fais, compte-tenu de l’importance des changements à opérer et de la proximité des échéances.
Voilà pour la première jambe.
La seconde manqua dans l’émission qui marcha donc de guingois.
Cette seconde jambe est celle du discours sur le système qui conduit au comportement humain cause du changement climatique. Moins pour trouver la réponse – les lecteur du blog savent qu’elle est la mienne – que pour assurer la pertinence des moyens d’adaptation. Il n’est pas possible de parvenir à changer nos comportements uniquement sous la menace des dangers à venir.
Autrement dit, il n’y a de pratique adéquate que celle qui est accompagnée de la problématique que constitue le questionnement de la cause première.
Il faut donc un discours qui pose la question – même si elle reste sans réponse – de ce qui conduit l’être humain à construire un tel rapport avec l’objet.