Le constat et la réponse d’Edgar Morin

Le Monde des Idées ( 23/01/2024) publie une tribune d’Edgar Morin intitulée « Face à la polycrise que traverse l’humanité, la première réponse est celle de l’esprit. »

Sa présentation du conflit israélo-palestinien est intéressante en ce sens qu’il n’utilise pas à propos de l’attaque du Hamas,  l’étiquette « terrorisme » dont l’emploi conduit le plus souvent à faire du 7 octobre un point de départ. Même si, quant à l’esprit de son discours, la précision peut paraître inadéquate, je rappelle qu’Edgar Morin (son nom d’état-civil est Nahoum) est d’ascendance juive. Elle l’est aussi pour moi, mais compte tenu des passions, elle n’est pas sans utilité.

Voici un extrait :

« Un nouveau foyer de guerre s’est allumé au Proche-Orient après le massacre commis par le Hamas le 7 octobre 2023, suivi par les bombardements meurtriers d’Israël sur Gaza. Ces carnages, accompagnés de persécution en Cisjordanie et de déclarations annexionnistes ont réveillé la question palestinienne endormie. (…)

Le discours change ensuite de nature quand il tente d’expliquer, notamment un fait objectif qu’il n’esquive pas : « C’est une des leçons tragiques de l’histoire : les descendants d’un peuple persécuté pendant des siècles par l’occident chrétien, puis raciste, peuvent devenir à la fois les persécuteurs et le bastion avancé de l’occident dans le monde arabe. »

Une leçon tragique renvoie à un quelque chose qui s’apparente au fatalisme, à un inexplicable.  Une leçon de quoi ?

La suite se perd dans la formule (« La crise de l’humanité qui n’arrive pas à devenir Humanité ») et l’incantation pour la réponse susceptible d’éviter la catastrophe : « La première et fondamentale résistance est celle de l’esprit. Elle nécessite de résister à l’intimidation de tout mensonge asséné comme vérité… »

Elle nécessite est répété pour d’autres objets de résistance analogues avant que ne soit précisé le remède :

« C’est l’union, au sein de nos êtres, des puissances de l’Eros et de celles de l’esprit éveillé et responsable qui nourrira notre résistance aux asservissements, aux ignominies et aux mensonges. »

Je ne sais pas ce qu’est l’humanité avec un h minuscule ni l’Humanité avec un H majuscule, ni ce qui peut produire cette « union au sein de nos êtres ».

La conclusion – métaphore et clichés – veut être une lumière d’espérance :  « Les tunnels ne sont pas interminables, le probable n’est pas le certain, l’inattendu est toujours possible. » Bon.

Je ne répète pas ce que je pense être la révolution qui nous reste à construire. Son importance et sa difficulté me semblent indiquées par la distorsion, sinon la contradiction entre l’objectivité du constat, et l’idéalisme du diagnostic et de la solution.

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